Le Conseil communal est-il en mesure de remplir son rôle dans le dossier du tram ? Au vu de la difficulté qui est faite aux conseillers d’accéder aux informations essentielles relatives à ce dossier, rien n’est moins sûr.
Une commission réunie du conseil communal s’est tenue le 1er février à l’hôtel de Ville, en présence du ministre Henry et de l’administrateur délégué de la SRWT, M. Vandenbroucke. Les conclusions de l’étude d’incidences sur l’environnement y ont été présentées, et les intervenants — dont M. Firket, qui exerce la compétence de la mobilité au sein du Collège liégeois —, ont assuré aux conseillers que les documents présentés (l’EIE elle-même, mais aussi les plans présentés et le powerpoint de la séance) seraient disponibles pour les conseillers qui le souhaitaient. En dépit de plusieurs courriers adressés à l’échevin à ce propos et qui sont restés sans réponse, il a pourtant fallu attendre pas moins de six semaines pour disposer de l’EIE… lorsque celle-ci a été mise en ligne par ses auteurs.
Lors de la commission du 21 février, précédant le Conseil du 25 février , il a fallu que les commissaires présents insistent à plusieurs reprises pour que M. Firket condescende à faire revenir, en soirée, un membre du personnel communal afin de communiquer aux conseillers les (700 pages d’) annexes de la convention liant la Ville à la SRWT, laquelle convention était à l’ordre du jour du Conseil (et fut votée par celui-ci) quatre jours plus tard. Et si — devant l’énormité de la situation — une nouvelle séance de cette Commission a dû être réunie le lundi suivant, juste avant le Conseil, il est évident que pareille situation n’a pas permis la tenue d’un débat serein et approfondi sur ce dossier pourtant hautement important.
Lors de la commission réunie de ce jeudi 28 mars , consacrée cette fois à la présentation de la demande de permis unique par l’auteur du projet, les plans de permis ont été présentés sur écran, mais aucun document n’a été remis aux conseillers (ni sous forme papier ni sous forme numérique). Là encore, les conseillers ont été assurés qu’ils pourraient en disposer rapidement. Malgré plusieurs demandes en ce sens, et alors que le début de l’enquête publique est imminent, M. Firket ne daigne pas même répondre aux courriers qui lui sont adressés.
Je me dois donc de poser le constat d’une rétention d’information caractérisée de la part de l’échevin de la mobilité, M. Michel Firket. Cette attitude injustifiable porte directement atteinte à la capacité du Conseil à effectuer son travail. Faute de parvenir à régler ce problème par les voies normales, il me semble à présent nécessaire de faire connaître cette déplorable situation de la presse et du public.
Mise à jour. En date du 10 avril, j’ai reçu la réponse suivante de l’échevin.
Monsieur le Conseiller communal,
En réponse à votre mail du 3 avril dernier, je souhaite vous confirmer que tous les documents vous sont adressés dans la mesure de leur disponibilité, dans les meilleurs délais possibles et dans tous les cas en respectant la réglementation.
Pour cette demande deux législations doivent être prises en considération :
• Le code de l’environnement Livre 1er Partie III : Information, sensibilisation et participation du public en matière d’environnement – Titre 1er Accès à l’information relative à l’environnement, chapitre Il – Information passive ou sur demande. Cette législation précise que « les informations doivent être communiquées au demandeur dès que possible et au plus tard dans le mois qui suit la réception de la demande » (art. D 15 §1er a). (Copie en annexe)
• Le code de la démocratie locale et de la décentralisation qui prévoit le droit de regard des Conseillers communaux et notamment l’article L 1122-10 §1 er et § 2 qui renvoie au règlement d’ordre intérieur du Conseil communal, lequel stipule, section 10 « Dispositions diverses, point 66 : « sur demande adressée au Secrétaire communal, les Conseillers communaux peuvent obtenir copie des pièces et actes administratifs à l’administration de la commune. »
Lors de la séance de commissions réunies du Conseil communal du 1er février, l’étude d’incidences venait d’être officiellement déposée par l’auteur de projet auprès de la SRWT. L’Administration communale ne disposait d’aucune copie. C’est par la presse du 20 mars 2013 que nous avons appris qu’elle était téléchargeable sur le site www.keskistram.be. Nous n’en avions toujours aucune copie ! Nous vous avons informé qu’elle était téléchargeable par courrier du 22 mars 2013.
En ce qui concerne les annexes de la convention de coopération publique-publique (document de 700 pages), j’avais demandé au secrétariat communal de joindre un CD à chaque convocation mais comme vous le savez, il n’a pas jugé nécessaire de le faire considérant que chaque conseiller a accès à tous les dossiers soumis au Conseil sur simple demande dès parution de l’ordre du jour du Conseil. Vous étiez donc autorisé à en faire la demande dès le jour de réception de cet ordre du jour. Néanmoins, pour les conseillers qui n’ont pas eu de copie en séance de commission sur leur clé USB, j’ai transmis un CD dès le lendemain, par porteur, au domicile de ceux qui l’ont demandé.
Quant au document présenté en séance de commission générale le 28 mars par la SRWT et à sa mise à disposition « rapide », il faut s’entendre sur le terme rapide. La SRWT se veut très prudente par rapport aux documents qu’elle diffuse afin d’éviter au maximum le risque d’un recours lié à une incohérence de documents, planches, images, etc. Tant que le dossier n’était pas déclaré « complet » par l’autorité compétente, il était susceptible d’ajustement, de complément.
Dès lors, même si la demande de permis a été déposée au S.E.D.I.I. le 18 mars 2013, lequel a transmis le dossier aux Fonctionnaires technique et délégué en vue d’examiner la complétude, celle-ci a été admise par les Fonctionnaires technique et délégué le 2 avril 2013, information reçue le 3 avril 2013 (Indicateur général de la Ville).
A partir de ce moment, vous pouvez évidemment consulter le dossier en prenant un rendez-vous avec le Département de l’Urbanisme. Il faut néanmoins savoir que la Ville a toujours refusé de remettre une copie des plans en raison de la propriété intellectuelle de ceux-ci. Cette attitude a toujours été confirmée par la DG04 et par le Département juridique de la Ville, même si une évolution est constatée sur ce point (point d’équilibre entre respect de la propriété intellectuelle et droit d’information des riverains amenant à autoriser la copie de certains plans).
Aujourd’hui, la S.R.W.T (auteur de projet) ayant décidé de mettre en ligne dès le 15 avril 2013 (début de l’enquête) la demande de permis et les plans l’accompagnant, j’ai demandé que vous soit porté ainsi qu’à chaque chef de groupe du Conseil communal, dans les meilleurs délais et autant que faire se peut avant le début de l’enquête, un CD reprenant le contenu de ce qui sera diffusé sur le site web de la S.R.W.T.
Je vous assure fermement qu’il n’est nullement question à aucun moment de retenir une quelconque information. Dès qu’elle est disponible, vous pouvez y avoir accès selon les modalités définies tant par le ROI du Conseil communal que par les législations en vigueur.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Conseiller communal, l’expression de ma considération distinguée.
Michel FIRKET
J’ai poursuivi l’échange avec un courrier du 29 avril, que voici.
Monsieur l’échevin,
Je vous remercie pour cette très intéressante réponse.
Je note tout d’abord qu’il semble que les règles internes de fonctionnement de la Ville ne respectent pas la législation. Car même si certaines pièces sont lourdes à communiquer, elles doivent l’être, sans quoi la délibération prise pourra être annulée sur la base du défaut d’information des conseillers.
En ce qui concerne l’argument que vous avancez relativement à la propriété intellectuelle de certains documents, qui justifierait une restriction de leur diffusion, j’avoue ma perplexité et donc ma curiosité à lire l’avis du service juridique de la Ville à ce propos. Car une éventuelle violation de droits intellectuels pourra être poursuivie, s’il y a lieu, permettant de réparer le préjudice subi par leurs titulaires (et l’acte officiel auquel ces pièces sont liées assure l’antériorité de la publication en cas de litige). Par contre, l’absence de diffusion de ces documents porte directement atteinte à la possibilité d’exercer un certain nombre de droits démocratiques qui ne sont pas hiérarchiquement inférieurs. On pourrait par ailleurs se demander si les contrats relatifs à la construction d’ouvrages publics (et c’est le cas dans lequel nous nous trouvons) ne devraient pas intégrer une clause prévoyant explicitement la publication large de tous les documents produits dans le cadre de ce contrat.
Plus fondamentalement, je constate, sans le moindre plaisir, que les inquiétudes que j’ai déjà exprimées à plusieurs reprises – et notamment lors du Conseil du 25 février dernier, lors duquel notre Conseil a adopté la Convention qui lie la Ville à la SRWT dans le dossier – s’avèrent bel et bien fondées : par cette convention et sans doute par votre volonté de vous couvrir de toute responsabilité plutôt que de jouer le rôle moteur que les Liégeois attendent de vous, la Ville de Liège est bel et bien devenue un acteur de second plan dans la mise en oeuvre de ce projet, un acteur à qui l’autorité régionale ne prend même plus la peine de communiquer des documents essentiels après les avoir pourtant présentés succinctement en Commission du Conseil.
Je vous laisse tirer les conclusions de cette déplorable situation. Pour ma part, c’est déjà fait.
Je vous prie d’agréer, Monsieur l’échevin, l’expression de mes sentiments choisis.
François Schreuer
Conseiller communal
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