Intervention de VEGA sur le Projet de déclaration de politique du logement , débattu lors du Conseil communal du 9 septembre 2013.
Monsieur le bourgmestre,
Madame l’échevin,
Je ne vais pas faire de détours : ce document, en dépit de quelques louables intentions, nous semble particulièrement peu consistant au regard des enjeux et des politiques réellement menées.
Quelques éléments :
Votre déclaration confirme ce que tout le monde savait mais que certains membres du Collège ont parfois eu du mal à admettre pendant la dernière campagne électorale : Liège ne dispose que de 8% de logements sociaux alors que nous sommes normalement tenu d’en offrir – au minimum – 10 %. La Ville ne respecte donc pas la norme régionale. Même si la notion de logement public est différente aux Pays-Bas, à titre de comparaison, à Maastricht, le secteur public détient plus de 60 % des logement. Alors que plus de 26 % de la population active domiciliée à Liège est sans emploi, le logement public joue un rôle essentiel, que ce soit pour l’accès des plus modestes à un logement, pour la lutte contre la spéculation immobilière et la hausse des prix (un parc public important permet de réduire celle-ci) ou pour impulser une véritable politique urbanistique (affectation des sols, mixité sociale, économies d’énergies,…).
Vous affirmez que le nombre de rénovations est en augmentation. Les demandes de permis d’urbanisme sont pourtant relativement constantes : entre 450 et 650 par an entre 2002 et 2011 (rénovations et nouvelles constructions). Soit le mouvement est très récent, soit il est très modeste.
Vous affirmez encore vouloir, je cite : « Renforcer la lutte contre l’insalubrité, les marchands de sommeil et réduire le nombre de logements abandonnés en utilisant tous les outils disponibles ». Il faut ici rappeler que la Ville a, au contraire, baissé, à la fin de la précédente législature, la taxe sur les immeubles inoccupés, la rendant beaucoup moins opérante. Je relève aussi que le service de Salubrité publique de la Ville, qui fait partie des compétences du bourgmestre, est en sous-effectif criant, rassemblant à peine une quinzaine d’agents pour assurer le suivi de 90 000 logements. Pour les permis de location, il n’y a que deux agents (un agent administratif et un agent technique) pour traiter les dossiers. On est donc loin, contrairement à ce que vous affirmez, de mobiliser tous les outils disponibles.
Le document réaffirme le rôle important de l’AIS. Très bien, il y a fort à faire. Mais aujourd’hui, l’ASBL « Liège Logement » (AIS de notre ville), qui a reçu pas moins de 500 demandes en 2010, gère environ 160 logements (chiffre en baisse) ce qui demeure relativement marginal en regard des SLSP mais aussi du nombre de logements vides (moins de 5 % des plus de 3 000 logements vides recensés). Cette AIS ne fonctionne pas bien. Son personnel est famélique (de deux assistantes sociales, un administratif, ainsi que d’un technicien) et en date du 15 février 2012, elle ne disposait plus d’un gestionnaire à temps plein depuis 9 mois. Aujourd’hui, elle ne dispose pas des moyens humains et financiers nécessaires afin de systématiquement contacter les propriétaires de logements inoccupés pour les inciter à les mettre en location. En particulier, elle ne dispose pas des moyens afin de réaliser des travaux et de créer des immeubles d’insertion avec loyers plafonnés.
Logement étudiant. Vous proposez de favoriser la création de « résidences » pour étudiants ? Fort bien. Le secteur privé ne semble d’ailleurs pas vous avoir attendu pour multiplier de façon impressionnante les initiatives sur ce terrain. Mais à quel prix ? C’est un enjeu majeur au plan de la démocratisation de l’enseignement supérieur. Par ailleurs, la location d’une ou deux chambres d’étudiants permet à à bien des foyers (jeunes n’ayant pas encore d’enfants ou personnes plus âgées, dont les enfants ont quitté la maison) d’équilibrer un budget et d’utiliser au mieux de grandes maisons qui, sans cela, seraient trop grandes pour ces familles.
Espaces verts à proximité des logements. Je note avec plaisir une inflexion significative dans le discours du Collège et j’espère qu’on n’entendra plus expliquer que l’existence du Sart-Tilman suffit, par son impact sur la moyenne à l’échelle de tout le territoire communal, à satisfaire aux besoins en espaces verts des Liégeois. Oui, il faut des parcs dans chaque quartier. Mais là encore, il y a loin de la coupe aux lèvres. Et les quartiers les plus sensibles sur ce point – les plus denses et ne disposant pas d’espace verts – ne semblent guère faire l’objet de l’attention qu’ils mériteraient. Le Longdoz est le plus emblématique de tous. À ce propos, j’attends toujours votre réponse à la question que je vous ai adressée au sujet du site « Palmolive » – qui permettrait de réaliser enfin le parc qui manque dans ce quartier. Mais des quartiers comme Bressoux, les Guillemins, Grivegnée-Bas ou même Jupille – et ce ne sont que quelques exemples – manquent eux aussi cruellement d’espaces verts et de loisir.
En ce qui concerne la localisation du logement sur le territoire communal, je note l’absence d’une stratégie – visant à favoriser une dynamique de développement harmonieux de la Ville, une localisation pertinente au regard des infrastructures de transport, la conservation de réserves foncières pour l’avenir (je pense en particulier aux terrains du CAR), une réponse au défi démographique pondérée par un minimum de réalisme visant à éviter la multiplication de projets concurrents qui pourrait aboutir en fait à une situation de statu quo. Sans doute la nature générale de ce document ne permet-elle pas d’entrer dans des exemples particuliers. On y reviendra sans doute.
Je terminerai en notant que l’immense majorité du parc immobilier liégeois est privé (plus de 90% de l’ensemble, dont 40 % en location et 50 % occupés par leurs propriétaires). Sachant qu’entre 2007 et 2011 le prix moyen d’une habitation à Liège est passé de 112.000 à 137.000 euros (soit une augmentation de plus de 22 % en 4 ans), on voit combien il est important qu’une ville comme Liège si elle souhaite continuer à accueillir des habitants, et des habitants de toutes conditions sociales, puisse mettre en place des mesures permettant d’encadrer le logement privé. Il est également important que la ville se préoccupe d’orienter l’affectation de ce parc dans le sens de l’intérêt commun.
En résumé, ce document tient à nos yeux largement de la poudre aux yeux, eu égard à la politique effectivement menée jusqu’à présent. Il dénote d’un manque de moyens qui ne dépend pas que du niveau communal, mais aussi d’un manque d’ambitions. Nous nous opposerons donc à ce texte.
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