Il est manifeste que le grand public ne mesure pas complètement l’impact que va avoir la loi sur la limitation dans le temps des allocations de chômage, dont le débat s’est achevé cette nuit à la Chambre.
Car cette loi, qui est présentée comme une réponse à des abus (qui sont en fait extrêmement minoritaires), elle aura principalement pour effet de plonger dans la pauvreté des centaines de milliers de personnes dont le seul « tort » est d’avoir eu une carrière hachée, d’avoir travaillé à temps partiel (le plus souvent de façon contrainte), d’avoir eu un problème de santé, d’avoir pris du temps pour élever des enfants ou prendre soin d’un proche gravement malade. Tous les profils sortant de l’idéal-type du CDI à temps-plein à vie seront sanctionnés, plus ou moins directement, par Clarinval-la-schlague, alors même que ce statut est aujourd’hui inaccessible à la majorité des travailleurs, alors même que de nombreuses entreprises ne proposent quasiment plus rien d’autre aux personnes peu qualifiées que de l’emploi précaire, intermittent, saisonnier, limité de toutes les façons possibles (quand elles ne tournent pas, pour les pires d’entre elles, avec une armée de stagiaires non rémunérés).
Le MR prétend défendre les travailleurs ? Il s’apprête en fait à mettre la tête sous l’eau à toutes celles & tous ceux qui ne sont pas dans une position de force sur le marché du travail. Ceux-là, non seulement n’auront même pas accès aux deux années de chômage en cas de licenciement (il faudra avoir travaillé 5 années à temps plein pour les obtenir, sans cela ce sera moins) mais subiront, aussi et surtout, l’immense dégradation des conditions de travail et de rémunération qui s’annonce, car, dans le nouveau paysage de l’emploi façon Clarinval, les travailleurs précaires seront contraints d’accepter n’importe quoi, à n’importe quelles conditions juste pour survivre. Et cela va encore s’empirer avec la démolition à venir du droit du travail, qui est le prochain chantier annoncé par Clarinval.
Ces dernières semaines et jusqu’à cette nuit, les députés de l’opposition — merci à eux — ont multiplié les amendements pour tenter d’atténuer la dureté de cette loi, notamment en essayant de préserver les publics les plus fragiles (parents d’enfants handicapés, aidants proches, familles monoparentales). En essayant de faire en sorte de préserver réellement les plus de 55 ans, dont l’écrasante majorité ne rentrera pas dans les critères fixés par la loi pour échapper à l’arrêt des allocations de chômage. En essayant de préserver un droit à la formation et à la reconversion professionnelle — déjà fortement amoindri par la mise en coupe réglée des crédits-temps.
TOUS ces amendements, même les plus modestes, ont été balayés par la majorité Arizona.
Ce qui se passe là est une forfaiture à l’égard de toutes celles et tous ceux qui ont cotisé et se voient voler l’assurance-chômage à laquelle ils avaient DROIT.
Ce qui se passe là est une attaque communautaire d’une ampleur invraisemblable contre la Wallonie et Bruxelles, car les exclusions du chômage toucheront massivement les communes pauvres du Sud du pays et beaucoup moins la Flandre (ceci dit au cas où quelqu’un penserait encore que le MR défend la Wallonie).
Ce qui se passe là est une violence plus vue en Belgique depuis des décennies contre tous les travailleurs mais aussi contre toute la société, qui va devenir plus inégalitaire, plus dure, plus dangereuse, alors que, dans les temps d’incertitude que nous vivons, les gouvernants devraient au contraire veiller à mieux sécuriser les trajectoires de vie de chacune et chacun.
Et la mauvaise nouvelle, c’est que cette violence va continuer et s’amplifier tant que nous resterons incapables de nous organiser et de nous regrouper pour faire pièce à cette régression.
Sans mobilisation politique et syndicale très forte face à lui, Clarinval, l’héritier d’une entreprise familiale qui n’a jamais connu une vie de salarié, le climato-sceptique ignorant des défis sociaux que porte le bouleversement en cours, l’homme qui ricane de joie, sur les plateaux télé, à l’idée de mettre 200.000 familles dans la dèche mais explique que ça lui « arrache le cœur » (sic) de devoir instaurer une taxation (maigre et trouée de partout) sur les plus-values sur actions, va continuer à sévir. N’ayez aucun doute à ce sujet.
Vous vous souvenez du vieux slogan : « Si tu ne t’occupes pas de politique, la politique s’occupe de toi ». Nous y sommes.
Regroupons-nous. Vite.
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